Renée Auphan,

la nouvelle directrice du

Grand Théâtre de Genève,


une Marseillaise, amie de la Suisse, au service de l'art lyrique.

 

Madame Renée Auphan a succédé à Hugues Gall à la tête du Grand Théâtre de Genève en juin 1955.

Habituée aux rives du Léman, puisque, depuis 1983, elle a créé puis dirigé avec succès l'Opéra de Lausanne, cette nouvelle responsabilité ne semble pas l'inquiéter. Au contraire, on sent, chez cette battante, une force et une habileté propres à déjouer toutes les embûches que chaque production réserve.

Son parcours professionnel explique peut-être cela puisque ses compétences allient des talents lyriques à des connaissances techniques: en effet, Renée Auphan a fait le conservatoire de Marseille et de Monte-Carlo et chanté en tant que mezzo-soprano à l'Opéra de Paris, du temps de Rolf Liebermann et elle a également suivi des études pour devenir metteur en scène. Avec ce bagage professionnel, la carrière de Renée Auphan se passera dans l'univers lyrique et, ayant épousé un Suisse, c'est à Lausanne que, toute fraîchement arrivée au début des années 80, elle réussit à imposer, d'année en année, un programme d'opéras de plus en plus renommés.

Ses nouvelles tâches

Tout d'abord, satisfaire un public International exigeant, avec un budget en équilibre acrobatique, puisque la subvention de la Ville de Genève de 10'300'000.- n'a pas changé depuis bientôt dix ans. Pour combler le déficit, il existe heureusement des sponsors et des mécènes généreux, grâce auxquels, notamment, le Grand Théâtre a pu se doter d'un système de surtitrage. Mais, selon Renée Auphan, tout spectacle d'opéra nécessite un budget élevé car, pendant le spectacle, tout se voit, tout s'entend et la moindre défaillance est immédiatement sanctionnée.

En second lieu, la nouvelle directrice doit faire face, dès l'été 1996, à des travaux de modernisation de la machinerie des décors du Grand Théâtre. En conséquence, les spectacles de la saison prochaine se donneront dans une très belle salle mais dont la scène et la capacité d'accueil seront plus réduites, ce qui entraînera la production de spectacles plus intimes.

En matière d'abonnements et de places disponibles la réponse de Renée Auphan est claire : les abonnements représentent 70 % des recettes du Grand Théâtre mais, en ces années de crise, ce sont les places bon marché qui sont les plus demandées et peut-être qu'avec 1'500 places disponibles, il sera possible d'accroître le nombre des abonnements meilleur marché pour satisfaire la demande d'amateurs aux revenus plus modestes.

Pour conclure, on peut aussi évoquer quelques traits de la personnalité de Renée Auphan. Elle a la double nationalité française et suisse et aime beaucoup vivre en Suisse, loin du parisianisme et de l'arrogance et de la moquerie qu'il dégage. Elle préfère les paysages proches des lacs aux montagnes escarpées et elle apprécie les petits vins blancs de la côte vaudoise.

Ses lectures comptent des auteurs suisses comme Ramuz dont elle a monté l'Histoire du soldat avec un réel plaisir, Chessex et, dans le domaine musical, elle admire Honegger.

Les chanteurs qu'elle apprécie le plus sont La Callas, Placido Domingo, José Van Dam, les opéras français comme Carmen de Bizet, Werther de Massenet, Samson et Dalila de Saint-Saens qui donnent aux interprètes féminines une plénitude vocale, musicale et scénique incomparables.

L'opéra, une ruche

Diriger un théâtre lyrique est une responsabilité passionnante pour Renée Auphan car il faut résoudre une multitude de problèmes qui vont de la gestion financière la plus rigoureuse à la confrontation à des situations cocasses ou embarrassantes, par exemple lorsqu'il y a des animaux sur scène ou quand un clavecin accompagnant des récitatifs est hors d'usage en plein spectacle... Il faut aussi avoir recours à un grand nombre de métiers en voie de disparition ou presque comme des brodeuses de costumes, des perruquiers, des cordonniers, des serruriers, des charpentiers ou un sculpteur... Cette ruche travaille dans l'ombre et concourt assurément au succès du metteur en scène et des chanteurs lyriques qui, eux, reçoivent les ovations des spectateurs dans la lumière des représentations si éphémères.

Le Grand Théâtre de Genève a accueilli une femme pour la première fois à sa tête. Souhaitons-lui succès et réussite pour la plus grande satisfaction d'un public exigeant.

Anne-Marie TREMEAUD


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